Le marché de la seconde main qui supplanterait bientôt celui du neuf dans le luxe, un centre commercial qui cartonne alors qu’il ne propose que des produits de seconde main en Suède. Des plateformes de vente d’occasion telles que Le Boncoin ou encore Vinted qui explosent… Doucement, mais sûrement, un nouveau mode de consommation s’installe dans nos pays occidentaux. Consommation, le mot est lâché…
Devenue la base de notre économie et de notre société, au point d’en être devenue le principal qualificatif, la consommation nous place face à un dilemme de conscience. On en a envie, notre économie en a besoin, mais notre planète n’en peut plus. Alors que faire ? Arrêter la machine ? Se voiler la face quant au désastre écologique en cours ?
La seconde main nous offre une voie de secours, une solution pour le citoyen de reprendre la main, de remettre un peu de sens dans ses achats et de protéger la planète. Le tout en faisant tourner l’économie, locale qui plus est ! Focus sur cette tendance de fond qui nous promet des jours heureux…
Faisons-nous mal un moment et attardons-nous sur les non-sens aberrants auxquels nous a menés la société de consommation poussée à l’extrême.
Quelques chiffres sur ce qui se passe en France :
Ces déchets, nous les devons en partie à ce que l’on appelle l’obsolescence programmée. Qu’elle soit technique (un modèle de chargeur qui n’existe plus), esthétique (un look trop démodé) ou logicielle (obligation d’utiliser la nouvelle version d’une application), elle nous pousse à toujours consommer.
Depuis les 30 Glorieuses, au fil des ans, la consommation, et donc l’utilisation de ressources, s’est complétement emballée. À tel point que nous battons d’une année sur l’autre le record de rapidité d’utilisation des ressources que peut offrir la Terre en un an. En 2018, ce fameux Jour du Dépassement Mondial, a été atteint le 1er août. En 1998, il n’était atteint qu’autour du 1er octobre, et dans les années 70, nous tenions jusqu’en début décembre avant de consommer nos ressources « à crédit ».
Face à tous ces constats, une pensée s’impose : il faut consommer autrement.
En France, comme dans de nombreux autres pays, notre modèle repose sur la consommation. Il faut donc continuer à faire tourner la machine.
Et par ailleurs, le shopping reste un plaisir important pour les français : plus de 63% d’entre eux déclarent faire du shopping au moins une fois par mois, 25% au moins une fois par semaine.
Que l’on approuve ou que l’on rejette ce modèle, le fait est que c’est bien lui qui règne sur notre économie. L’heure n’est pas au jugement de valeur mais à l’action. Et les options sont limitées : continuer sans rien changer, changer brutalement de modèle ou proposer une 3ème voie alternative.
Cette troisième voie, ce serait un retour aux sources : renvoyer l’économie linéaire (je produis, je consomme, je jette) aux oubliettes pour repartir sur une économie circulaire, toujours basée sur la consommation certes, mais moins gourmande en ressources naturelles.
S’il fut un temps où le bonheur passait par l’abondance matérielle, cette période semble révolue. Désormais, ce sont les aspects émotionnels, sociaux et spirituels qui prévalent. On veut vivre en accord avec sa personnalité, ses valeurs, ses convictions…
Et cela se ressent sur l’économie. Prenons l’exemple de l’agro-alimentaire. En 2016, on a constaté que l’achat de produits de grande consommation et de produits frais avait légèrement diminué en France. On consomme moins d’alcool, moins de viande et moins de produits laitiers : les français adoptent des régimes alimentaires plus « sobres » qui leurs semblent plus sains.
Dans la même lignée, l’association Zero Waste France, qui promeut un mode de vie sans gaspillage, a lancé le défi « rien de neuf ». Le principe : préserver les ressources de notre planète en essayant d’acheter le moins d’objets neufs possible. 20.200 personnes s’y sont inscrites depuis janvier, l’objectif est d’atteindre les 100.000 participants.
De son côté, l’association HOP (Halte à l’Obsolescence Programmée) alerte sur le fait que les ménages les plus modestes sont les premières victimes de l’obsolescence programmée. Le faible pouvoir d’achat les pousse à acheter des produits de moins bonne qualité et qui doivent être fréquemment renouvelés.
Voilà qui nous amène à une notion souvent ignorée mais pourtant primordiale : le « total cost of ownership ». Il s’agit d’intégrer au prix d’un produit ses externalités positives et négatives. Prenons l’exemple d’un t-shirt. Vous en trouverez facilement à 7 ou 8 euros chez plusieurs marques de « fast fashion ». Mais, il est fabriqué dans des pays lointains, potentiellement par un enfant. Les conséquences : des emplois délocalisés, un long transport avec toute la pollution que cela entraine et l’exploitation d’une main d’œuvre sous-payée. Concrètement cela représente un coût pour notre pays (désindustrialisation), pour notre planète (bilan carbone) et pour l’humanité (travail des enfants). Et c’est ainsi que l’on crée un cercle vicieux : plus l’on consomme ces produits bon marché, plus l’on détruit nos entreprises et nos emplois. On crée ainsi davantage de chômage, et moins on a d’argent plus on consomme des produits bon marché…
Prenant de plus en plus conscience de ces enjeux, les citoyens changent leur comportement d’achat. Et c’est ainsi que de nouveaux marchés émergent. Celui de la réparation par exemple. De plus en plus de consommateurs favorisent le « moins mais mieux ». Or, quand on investit dans un produit de qualité, on est plus prompt à le faire réparer que lorsqu’il s’agit d’un produit d’entrée de gamme. Et ce, tout simplement parce que rapportée au prix d’achat, la réparation est plus rentable. Un peu partout en France, les repair cafés essaiment, de même que les franchises de réparation de smartphones et les sites de vente en ligne de pièces détachées. Sauf que pour l’instant, l’offre dans le secteur de la réparation n’est pas encore très organisée. Et l’ADEME pointe le « manque d’information sur la réparation et la recherche souvent fastidieuse de bonnes adresses« .
L’up-cycling, traduisez « surcyclage », et le marché de la seconde main ont également le vent en poupe. Précurseur, Le Boncoin a facilité et normalisé l’achat d’occasion. Depuis, l’idée a fait des petits. À tel point que dans certains secteurs, le marché de l’occasion risque de dépasser celui du neuf. C’est le cas de la mode où l’on prévoit que le marché de la seconde main sera plus important que celui du luxe d’ici 2022. C’est demain !
L’upcycling consiste à sublimer des matériaux usagés en les transformant en pièces neuves détournées de leur usage d’origine. Cela s’applique à tous les secteurs : mode, décoration, design, mobilier… Et ça marche ! Devenu terriblement tendance, l’upcycling fait de surprenants nouveaux adeptes. Ainsi la maison Hermès a développé la marque « Petit h » composés d’ OPNI (Objets Poétiques Non-Identifiés) fabriqués à partir des rebus issus ses ateliers de création.
À rebours de l’économie linéaire, ces nouveaux marchés créent un véritable cercle vertueux. Les emplois ainsi créés resteront non-délocalisables (on répare sur place), les matériaux destinés à la déchetterie sont revalorisés et c’est finalement un nouveau tissu économique local qui se développe avec à la clé une nouvelle source d’interactions sociales.
Ils sont désormais légions, mais en matière de seconde main, le plus connu est certainement Vinted. L’application permet d’échanger ou de revendre facilement les vêtements dont nous n’avons plus l’utilité.
En matière d’upcycling, on peut citer la plateforme Repris de Justesse qui référence les marques et créateurs engagés dans l’upcycling.
Plus arty et moins facilement portable, la Maison Mourcel. Constituée uniquement de pièces uniques, la nouvelle collection est conçue à partir de fripes et de chutes de tissus.
Les meubles vintages sont devenus un must dans la déco actuelle. De nombreux acteurs s’en sont fait une spécialité. C’est le cas notamment de la boutique Pieds Compas, à Lyon.
Plusieurs créateurs se sont également spécialisés dans l’upcycling. C’est le cas notamment de Pimp your Waste dont les meubles sont entièrement réalisés avec des matériaux de récupération.
Utilisés quelques mois, au mieux quelques années, les jouets méritent une seconde vie. C’est ce que leur propose l’association Rejoué qui collecte, revalorise et commercialise des jouets usagés.
Envie-Rhône récupère, rénove et revend du petit et gros électroménager. Basée à Lyon, l’entreprise a une triple vocation sociale, environnementale et économique. Elle compte une dizaine de salariés permanents qui accompagnent plus de 20 collaborateurs en insertion.
Nous venons de le voir, on peut désormais trouver de nombreux biens à la fois de seconde main et de qualité. D’où la lumineuse idée de les considérer comme des marchandises à part entière et donc les regrouper au sein d’un centre commercial dédié.
Bien loin de l’univers « marché aux puces », ReTuna, en Suède, offre une expérience shopping haut de gamme dans un cadre très design et épuré. Ici, on peut acheter de tout, comme dans un centre commercial classique : ordinateurs, produits high tech, vêtements, déco… À la différence près qu’ici on ne trouve que des produits recyclés. Un shopping de masse donc, mais moins destructeur pour notre environnement et notre économie locale. Une initiative inspirante qui a créé une cinquantaine d’emplois directs et qui devrait faire des petits un peu partout en Europe !
3 minutes Pour manger un biscuit, il faut souvent en passer par l’épreuve des poupées russes: on ouvre un premier emballage, le carton, puis un deuxième, le plastique, puis au fond du troisième,
8 minutes Temporaires, partagés, mobiles… les bureaux se réinventent en même temps que notre vision du travail. Une métamorphose riche de belles promesses autant que d’écueils à éviter.